Camboya - Les contrats à court terme se généralisent et affaiblissent les syndicats (2011, 2012)

Beaucoup de contrats de travail à durée indéterminée sont remplacés par des contrats à court terme (d’un à six mois), ce qui permet aux employeurs de ne pas accorder aux travailleurs certains droits garantis par la législation du travail (congés annuels, congé de maternité, etc.). Par ailleurs, les travailleurs craignent de s’affilier à un syndicat, de peur de ne pas voir leur contrat à court terme renouvelé.

Comme l’explique le rapport de 2011 de l’université de Yale, Tearing Apart at the Seams, le passage vers des contrats à durée déterminée n’est pas du tout lié à la baisse du nombre de travailleurs/euses réguliers à temps plein mais reflète plutôt une décision prise par l’ensemble de l’usine de la confection pour reclasser simplement les travailleurs/euses. De nombreuses usines de la confection ont à présent constitué l’ensemble de leur main-d’œuvre en engageant des travailleurs/euses sur la base de contrats à court terme renouvelés à plusieurs reprises. Cette pratique viole la loi sur le travail mais est largement autorisée dans la pratique. L’article 67 de la loi sur le travail de 1997 stipule que « Le contrat de travail conclu pour une durée déterminée ne peut être conclu pour une durée supérieure à deux ans. Il peut être renouvelé une ou plusieurs fois, pour autant que le renouvellement n’entraîne pas un dépassement de la durée maximale de deux ans. » Le Conseil d’arbitrage, à qui il appartient d’interpréter et d’appliquer la loi du travail, a jugé que l’article 67 impose une limite de deux ans aux renouvellements des contrats à durée déterminée pour toute la durée de la relation de travail, et non pas dans le cadre de chaque renouvellement de contrat. Les fabricants de vêtements contestent cette interprétation de la loi et, dans la pratique, ne tiennent pas compte de la décision.

Les incidences juridiques de l’emploi sous contrat à durée déterminée sont nombreuses. Tout d’abord, les travailleurs/euses sous contrat à durée déterminée bénéficient simplement de moins de droits et d’avantages. En outre, il est plus facile de licencier des travailleurs/euses sous contrat à durée déterminée que sous contrat à durée indéterminée. Enfin, l’indemnité de licenciement, notamment les dédommagements et/ou les prestations, est largement inférieure à ce que percevrait un travailleur sous contrat à durée indéterminée.

Dans la pratique, le passage à des contrats à durée déterminée porte atteinte à la liberté syndicale et à la négociation collective. Le recours à des contrats à durée déterminée (qui sont de plus en plus courts) crée une grande instabilité pour les travailleurs/euses, qui craignent avec raison que leurs contrats ne soient renouvelés s’ils n’obéissent pas à l’employeur – voire s’ils s’affilient à un syndicat. Organiser un syndicat prend du temps – dans de nombreux cas, plusieurs mois, si ce n’est davantage. Si un travailleur est engagé dans le cadre d’un contrat de trois mois, il peut ne plus être présent lorsque les formalités sont remplies. Compte tenu du mouvement créé par l’emploi à court terme, il est également difficile d’identifier et de former des dirigeants syndicaux. Il est fort probable, en particulier dans les usines où une majorité des contrats sont conclus pour une durée déterminée, qu’un dirigeant ne soit pas en mesure de terminer un mandat de deux ans. En outre, en vertu de la loi sur le travail, les dirigeants doivent avoir un an d’expérience professionnelle dans l’entreprise, expérience qui est difficilement prolongée dans le cadre des contrats à durée déterminée. En raison de ces contrats, il est plus difficile de prouver les représailles antisyndicales.

© ITUC-CSI-IGB 2013 | www.ituc-csi.org | Contact Design by Pixeleyes.be - maps: jVectorMap