Monténégro
Les organisations affiliées à la CSI au Monténégro sont la Confédération des syndicats du Monténégro (SSCG) et l’Union of Free Trade Unions of Montenegro (UFTUM).
Le Monténégro a ratifié la Convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (1948) en 2006 et la Convention n° 98 sur le droit d’organisation organisation Processus consistant à former ou à s’affilier à un syndicat ou à inciter d’autres travailleurs à former ou à s’affilier à un syndicat. et de négociation collective (1949) en 2006.
Dans la loi
Liberté syndicale / Droit d’organisation
Liberté syndicale
Le droit à la liberté syndicale est garanti par la Constitution.
Le droit à la liberté syndicale est réglementé par la législation.
Discrimination antisyndicale
La législation interdit la discrimination antisyndicale mais ne prévoit aucun moyen de protection adéquat.
Droit de négociation collective
Droit de négociation collective
Le droit de négociation collective est reconnu par la législation.
Obstacles juridiques à la reconnaissance des agents de la négociation collective
- Conditions excessives quant au respect de la représentativité des syndicats ou au nombre minimum de membres nécessaires pour négocier collectivement
- Seuls les syndicats représentatifs, à savoir ceux qui ont le plus grand nombre de membres inscrits, peuvent prendre part aux négociations collectives.
Restrictions au principe de négociation libre et volontaire
- Autorités habilitées à intervenir dans la préparation des conventions collectives
- Le gouvernement participe aux négociations sur les « conventions collectives générales », c'est-à-dire les conventions collectives à l'échelle nationale.
Droit de grève
Droit de grève
Le droit de grève est garanti par la Constitution.
Limitations ou interdiction de grèves dans certains secteurs
- Restrictions injustifiées en ce qui concerne les fonctionnaires
- La loi stipule que le droit de grève peut être restreint pour le personnel des forces armées, de la police, des organismes d’État et des services publics dans le but de protéger l'intérêt public.
- Détermination déraisonnable ou discrétionnaire (sans négociation avec les partenaires sociaux
partenaires sociaux
Désigne les syndicats et les employeurs ou leurs organisations représentatives.
ou absence d’une autorité indépendante en cas de désaccord)de la portée du « service minimum
service minimum
Opérations normalement requises dans un établissement public ou privé lors d’une grève, pour ne pas mettre en danger la vie ou les besoins élémentaires de la population ou causer des dégâts irréversibles.
Voir Guide des droits syndicaux internationaux de la CSI » à garantir pendant les grèves dans les services publics - Un service minimum doit être garanti dans certaines activités comme les services postaux, la radio et la télévision, la collecte des immondices, l’éducation, la culture, l’assistance sociale et la garde des enfants. La loi régissant la grève a été amendée en 2005 afin de garantir que la procédure de mise en place d’un service minimum s’effectue en concertation avec l’organisation syndicale concernée. En cas d’échec des négociations, l’employeur peut toujours décider unilatéralement d’établir un service minimum.
En pratique
L’Union des syndicats libres du Monténégro a attiré l’attention sur la loi monténégrine sur la faillite, car, conformément à la loi, lorsqu’une procédure d’administration judiciaire est entamée, les salariés peuvent subir d’importantes limitations de leurs droits individuels et collectifs. La question a pris une ampleur indéniable ces cinq dernières années étant donné qu’en si peu de temps, 2.363 sociétés monténégrines ont entamé des procédures de faillite.
Le personnel de ces entreprises a subi un affaiblissement de ses droits malgré leur reconnaissance reconnaissance Désignation d’un syndicat par un organisme gouvernemental comme agent négociateur représentant les travailleurs au sein d’une unité de négociation, ou fait pour la direction d’accepter que ses travailleurs puissent être représentés collectivement par un syndicat. explicite dans la loi et dans d’autres réglementations. Les salariés de sociétés en faillite semblent n’avoir d’autres choix que de supporter des conditions discriminatoires par rapport aux autres salariés du Monténégro. Plus spécifiquement, en ce qui concerne les droits individuels, ces salariés ne bénéficient pas des droits à des congés annuels, à des congés payés en cas d’incapacité temporaire de travailler, aux heures supplémentaires rémunérées, à bénéficier de la sécurité et la santé au travail, à travailler 40 heures par semaine et à disposer de jours de congé le week-end. Du reste, ils subissent des discriminations au niveau du salaire puisque, conformément à la loi sur la faillite, les administrateurs peuvent les rémunérer le salaire minimum pour un emploi à plein temps et n’ont donc pas à appliquer les dispositions des conventions collectives et des lois sur les rémunérations en vigueur dans le secteur. Outre des limitations des droits individuels, en cas de faillite, l’entreprise peut aussi limiter les droits collectifs : un syndicat ne peut pas organiser ni agir dans de telles sociétés et les travailleurs ne bénéficient d’aucune liberté syndicale.
Les travailleurs de la société minière en faillite Bauxite Mines, à Niksic ont protesté pour leurs salaires impayés. Les salariés, épuisés par trois offres infructueuses, ont manifesté leur désaccord envers la décision de la direction de rejeter une offre de 4,4 millions d’euros de la part de la société locale Neksan, considérée comme insuffisante pour le rachat de l’entreprise. Pour réagir à cette énième interruption de la procédure de vente qui aurait permis au personnel de percevoir enfin ses rémunérations, environ 200 salariés ont décidé de manifester dans les rues et de se diriger vers Niksic. Des policiers ont fait irruption dans la manifestation et l’ont stoppée, mais des mineurs sont parvenus à bloquer les rues. Par l’intermédiaire de leur dirigeant syndical, Borisav Bojanovic, ils ont annoncé qu’ils lèveraient les barrages si la réunion avec le gouvernement portait ses fruits et si le tribunal de commerce, qui a déclaré la faillite de la mine en 2013, acceptait la vente de la société.
Le 30 juin 2015, 126 des 392 travailleurs employés sur le chantier naval Adriatic Shipyard Bijela ont été renvoyés dans la foulée d’une décision du tribunal de commerce d’entamer la procédure de faillite de la société à la suite de quatre échecs de reprise. Le personnel a réagi en faisant grève pour exiger une compensation pour les cinq années sans services et le versement des salaires dus de mars à juin. Une réunion a été organisée entre des représentants du chantier naval et le gouvernement. Les travailleurs ont prévenu que si la réunion ne portait pas ses fruits, ils radicaliseraient leur mouvement de protestation en empêchant les navires de quitter le chantier ou d’y entrer. Cette grève n’est qu’une d’une série entamée par les travailleurs monténégrins en 2015 contre les salaires impayés et l’affaiblissement des droits découlant de procédures de faillite. D’autres arrêts de travail sont survenus notamment chez Metalac, au sein de l’administration locale de Kolasin et dans la société Podgorica Tobacco.
Sandra Obradovic, la présidente du syndicat le plus représentatif
syndicat le plus représentatif
Syndicat qui représente le plus grand nombre de travailleurs au sein d’une unité de négociation. Peut se voir confier la représentation exclusive des travailleurs, étant dès lors le seul syndicat autorisé à représenter ces derniers lors des négociations collectives.
au sein de Kombinat Aluminijuma Podgorica (KAP), la société la plus importante du Monténégro qui produit et transforme de l’aluminium, a été injustement licenciée en raison de son rôle actif de syndicaliste. À la suite de problèmes commerciaux survenus dans la foulée de sa privatisation, KAP a entamé une procédure d’administration judiciaire en mai 2013 pour stimuler sa reprise économique. Pendant toute la période où la société était en procédure de faillite, le personnel n’avait pas le droit de prendre des congés annuels. Face à un tel abus, Sandra Obradovic s’est plainte à la société et, n’ayant aucune réponse de la part de la direction de KAP, en a référé directement au ministère du Travail et du Bien-être social. Ce dernier a émis un avis dans lequel il annonçait clairement que même lors d’un processus de faillite, les salariés avaient le droit de prendre des congés annuels. Forte de cet avis, Sandra Obradovic est allée revoir la direction de KAP qui, pour toute réaction, l’a renvoyée avec seulement un jour de préavis, invoquant une rationalisation des coûts de production et le besoin de rajeunir le personnel. Néanmoins, la nature discriminatoire du licenciement s’est avérée évidente, lorsque, quelques jours plus tard, une nouvelle personne a été engagée au poste d’Obradovic. Pour réagir au comportement antisyndical de la société et en consultation avec l’Union des syndicats libres du Monténégro, le Comité exécutif du syndicat de KAP a décidé de confirmer Sandra Obradovic à son poste de présidente du syndicat. Le 30 avril, alors qu’elle essayait d’accéder aux locaux syndicaux en tant que présidente, des gardes de sécurité privés de KAP l’en ont empêchée. Une fois encore la réaction de la société a confirmé son attitude antisyndicale, en infraction de la convention collective
convention collective
Accord, généralement écrit, qui intègre les résultats de la négociation collective entre les représentants des travailleurs et des employeurs.
Voir négociation collective
générale du Monténégro et de son Code pénal, tous deux prévoyant l’obligation légale pour l’employeur de garantir l’accès aux locaux pour les activités syndicales.
Les travailleurs/euses du Barkli Montenegro Hotel Otrant à Ulcinj se sont mis en grève, le 4 mai 2012, après 17 mois de non-paiement de leurs salaires. Bien que la grève ait été pacifique, quatre membres syndicaux ont été arrêtés et libérés suite à l’intervention du président du syndicat de la municipalité. Le tribunal a rejeté les charges retenues contre les syndicalistes.
Les licenciements, rétrogradations et autres discriminations à l’encontre de militants syndicaux ne sont pas rares. Le droit de grève est souvent limité dans la pratique et les syndicalistes subissent des représailles, notamment des menaces de licenciement pour leur militantisme syndical. Le problème est exacerbé par une législation restrictive en matière de grève et par la souplesse excessive des relations d’emploi. Par conséquent, la plupart des grèves n’ont lieu qu’après des mois de salaires impayés, généralement dans des entreprises qui risquent déjà la faillite.